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L'ACP a eu le plaisir de recevoir Miguel Pinheiro le 24 avril à l'occasion de la présentation de son nouveau livre A Noite Mais Longa (La Nuit la Plus Longue). Nous vous laissons ici quelques éléments pour découvrir le journaliste et son nouveau livre.

 

 

 

 

 

 

 

 

                                                                     

                                                                     MIGUEL PINHEIRO

 

"Dans la nuit du 6 septembre 1968, les figures les plus importantes de "l'Etat Nouveau" se sont divisées en deux groupes pour participer à deux évènements qui ont eu lieu au même moment, à quelques kilomètres l'un de l'autre. Le premier fut couvert par secret le mieux gardé du pays : a l'hôpital de la Croix Rouge, Antonio Oliveira Salazar fut opéré d'urgence à la suite d'une chute d'une chaise.

Le second fut l'un des évènements les plus annoncés de tout le pays : dans sa demeure de Alcoitão, le millionnaire bolivien Antenor Patiño a donné ce qui resta dans l'histoire comme "le bal du siècle". Ce furent treize heures interminables où se mélangèrent le drame et l'ostentation - et qui ont marqué la fin du Salazarisme. Grâce à des documents et des dépositions dans la majorité inédits, le journaliste Miguel Pinheiro a reconstitué de manière détaillée les épisodes, les ambiances et les dialogues des deux évènements qui ont eu lieu cette nuit là.

 

La date à laquelle Salazar tomba de sa chaise, les détails du mois qui ont vu l'accélération de la décadence physique du dictateur et ce qui s'est réellement passé dans la salle d'opération. Les polémiques de la fête du Roi de l'Etain, l'impacte de l'arrivée des actrices de Hollywood, des membres des familles royales européennes et des certains hommes les plus riches de l'époque et les histoires des journalistes qui ont dû se faire passer pour des employés pour infiltrer un des bals les plus surveillés par la police et la PIDE (Police Internationale de Défense de l'Etat). Tout s'est passé entre 20 heures et 9 heures du matin. Au matin le Portugal était un pays gouverné depuis 36 ans par le même homme. A la fin, s'était un pays où plus rien ne serait plus comme avant."

 

Miguel Pinheiro est journaliste. Il a publié deux livres chez "Esfera dos Livros" : la biographie de Sá Carneiro (2010) et, en collaboration avec Gonçalo Bordalo Pinheiro, La "Machine du Pouvoir" - les coulisses des trois plus grands partis politiques en campagne (2014). Il fut, pendant neuf ans, le directeur de la revue Sábado. Il est né en 1974, diplômé en droit à l'Université de Lisbonne et a commencé à travailler comme journaliste dans l'hebdomadaire O Diabo (le Diable). Il a été reporter et éditorialiste politique, société et international, au quotidien A Capital (La Capitale). Il a été directeur adjoint du journal 24 Heures. Il a collaboré avec d'autres organes de presse comme L'Observateur (Observador), l'Indépendant (O Independente), Maxmen, et les revues brésiliennes République (República) et Bravo!

 

Il fut également commentateur du programme Thermomètre Politique (Termómetro Político), sur RTP Information. En 2001, il a reçu le prix Grand Reportage attribué par la revue Grand Reportage (Grande Reportagem).

Œuvres publiées : Sá Carneiro, A Máquina do poder (la machine du pouvoir), A noite mais Longa (La nuit la plus longue).

 

 

MANUEL ALEGRE

 

 

Né en 1936 à Agueda, étudiant à Coimbra, il fait très vite le choix de la résistance au régime de Salazar, ce qui le conduit aux Açores pour le service militaire, et à 10 ans d'exile à Alger. Il écrit Praça da Canção et O Canto e as Armas. Dès le coup d'état en 1974 il devient une figure importante du P.S. portugais.

Que l'on soit jeune, ou jeune dans sa tête, tout le monde connait Manuel Alegre. Les jeunes le connaissent en tant qu'homme politique qui a brigué la Présidence de la République Portugaise en 20... nous, les moins jeunes, l'avons connu militant politique et surtout poète. C'est cette partie  du personnage qui m'intéresse plus particulièrement aujourd'hui.

"j'aime les femmes de mon pays / blondes brunes grandes ou petites... de toutes je suis le fils / l'amant et le fiancé... pour elles / je suis allé sur la mer / au loin / pour elles / je suis revenu..." nous disait-il dans son livre O canto e as armas (le chant et les armes), avec quelle infinie tendresse nous parlait-t-il aussi de sa propre mère.

"Et toutes les années, quand vient le mois de mai, ou exactement, le douze mai, à dix heures et quart (c’est l’heure à laquelle je suis né), ma mère ouvrait la porte de ma chambre, elle me réveillait avec un baiser et déposait dans un vase un bouquet de roses rouges, sans un mot. Seules ses mains, arrangeant les fleurs, officiaient dans cet étrange silence plein de rites et de tendresse".

C'était elle aussi qui venait remettre de l'ordre dans sa tête lorsque "Parfois j’avais des cauchemars, je me réveillais, au milieu de la nuit, quelque chose semblait se disloquer et alors je criais : Maman !

et immédiatement cette voix, si calme, entrait en moi, renvoyait les fantômes, et c’était de nouveau ma chambre, la douce chaleur de ma maison au sommet de la tendresse."

Et puis vient le temps où l'on n'est plus maître que de sa pensée.

"En mai 1963 j’étais en prison. Parfois, au milieu de la nuit, un cri ébranlait les poutres de ma tête, de ma propre vie en fait, et je me réveillais en sueur, le corps endolori, comme si un rat (peut-être la peur ?) me dévorait l’estomac. Et c’était inutile de crier. Où était maintenant cette voix qui auparavant venait apaiser mon sommeil, apportant la paix en moi ? Où étaient passés les matins de mai, lorsque se réveiller était une fête ? Où était la tendresse ? Où était resté ma vie ?".

Et c'est quand le désespoir pouvait venir à bout de la volonté qu'on peut se poser la question "Mais est-ce que j’aurais pu choisir un autre chemin ? Aurais-je pu dormir tranquillement, en sachant que quelque part, dans la nuit, il y a des hommes qui frappent, il y a des hommes qui crient ?"

C'est dans ces moments là qu'un rituel prend tout son sens "C’est pour cela qu’en mai 1963, j’étais en prison, en fait, d’une certaine manière, j’étais à mon poste. Le douze, je ne me suis pas réveillé avec un baiser de ma mère. Cependant, ce matin là (je ne peux pas dire l’heure avec certitude, je n’avais pas de montre, mais - qui sait -, à dix heures et quart, l’heure à laquelle je suis né), le gardien a ouvert la porte et m’a remis, ouverte, une lettre de ma mère. Et en dépliant les feuilles de l’enveloppe violée, un pétale rouge, d’une rose rouge, est tombé, comme une larme de sang, sur le sol de ma cellule. "

Ce rituel lui a fait supporter l'insupportable et c'est ce Manuel Alegre là que je garde en mémoire, celui qui nous faisait passer des heures assis sur un banc à déclamer des vers, à l'ombre des grands arbres du jardin botanique à Coimbra.

Je ne peux, donc, que vous inviter à vous procurer "O canto e as armas" (le chant et les armas) et "A praça da canção" (Place de la chanson) et vous aussi, j'en suis sûr, vous vous mettrez à déclamer des vers sur un banc...

(En gras : extraits du poème "Rosas Vermelhas").

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